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La perte d’un testament manuscrit par force majeure peut être palliée par sa photocopie

Perte d’un testament manuscrit par l’expert-judiciaire auquel il a été confié et impossibilité de le retrouver malgré les recherches du juge et du second expert désigné : un cas de force majeure autorisant celui qui s’en prévaut à produire sa photocopie.

Cass. 1e civ. 31-3-2016 n° 15-12.773


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Un homme décède, laissant pour lui succéder onze héritiers. Deux autres personnes invoquent le bénéfice d’un testament manuscrit (« olographe ») attribué au défunt, les instituant légataire universelle pour l’une, légataire particulier pour l’autre. Les héritiers contestent la validité de ce document. Sur ordonnance du tribunal, le notaire dépositaire remet le testament à un expert judiciaire pour vérification d’écriture. Mais ce dernier décède et le testament s’avère perdu. Il demeure introuvable, malgré de nombreuses recherches entreprises, tant par le magistrat chargé du contrôle des expertises, que par le second expert désigné en remplacement. Les prétendus légataires en produisent alors les photocopies réalisées par le notaire. Pour écarter ces pièces, les héritiers soutiennent que la perte de l’original par l’expert ne constitue ni un cas fortuit, ni un cas de force majeure autorisant celui qui s’en prévaut à prouver par tous moyens l’existence et le contenu du testament (C. civ. art. 1348).

La cour d’appel, au contraire, admet la preuve de l’existence du testament par la production de ces photocopies. Les circonstances de l’espèce étaient telles que la perte de l’original se rattachait à un fait extérieur, irrésistible et imprévisible, caractérisant un cas de force majeure. La Cour de cassation confirme.

A noter : lorsqu’un écrit a été perdu par suite d’un cas fortuit ou d’un cas de force majeure, sa preuve peut être faite par tous moyens (C. civ. art. 1348, al. 1).

Ainsi, en cas de perte de l’original du testament, le légataire qui est en possession d’une copie peut en invoquer le bénéfice s’il parvient à prouver :

- qu’il était dépositaire du testament ;

- que la copie qu’il détient est la reproduction fidèle et durable de l’original qui a existé jusqu’au décès du testateur et n’a pas été détruit par lui, de sorte qu’il est la manifestation de ses dernières volontés ;

- que la perte du testament résulte d’un cas fortuit ou d’un cas de force majeure, autrement dit d’un événement imprévisible, irrésistible et extérieur.

Dans l'affaire commentée, de nombreuses recherches avaient été effectuées et tout avait été tenté pour retrouver l'original. Ces investigations étant restées vaines, les juges ont pu en déduire que la perte du document était liée à un événement extérieur, indépendant de la volonté du testateur et de ses bénéficiaires, contre lequel on ne pouvait rien. La force majeure était ici caractérisée.

En pratique : une telle solution est assez exceptionnelle, rares étant les situations réunissant toutes les conditions précitées. Observons enfin que ce régime de preuve demeurera applicable après l’entrée en vigueur de la réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations (Ord. 2016-131 du 10-2-2016 : JO du 11). L’esprit de l’article 1348 alinéa 1 du Code civil se retrouve en effet dans le nouvel article 1360, applicable à compter du 1er octobre 2016.

Florence GALL-KIESMANN

Pour en savoir plus sur les conséquences de la perte d'un testament olographe : voir Mémento Patrimoine n° 27556.

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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