Des éléments cachés par le salarié ?
Les faits.
Un employeur accepte de signer une RCI avec un responsable commercial ayant invoqué sa volonté de se reconvertir dans le management. Or, il avait en fait initié un projet d’entreprise dans le même secteur d’activité avec 2 anciens salariés, motif de son départ qu’il avait tu à son employeur. Ce dernier demande alors la nullité de la RCI pour dol, estimant que son consentement a été vicié par les allégations du salarié.
À savoir.
Pour rappel, le dol peut être constitué par la dissimulation intentionnelle par l’une des parties au contrat d’une information dont elle sait le caractère déterminant pour l’autre partie (C. civ. art. 1137) .
La solution.
Pour les juges, il est établi que l’employeur s’est déterminé au vu du seul souhait de reconversion professionnelle invoqué par le salarié, et que ce dernier, pour obtenir l’accord de l’employeur, lui a volontairement caché des éléments dont il savait qu’ils étaient déterminants pour lui (Cass. soc. 19-6-2024 n° 23-10.817) .
Les conséquences.
Une fois le vice du consentement établi, les juges en tirent les conséquences sur la qualification de la rupture : lorsque le contrat est rompu en exécution d’une RCI ensuite annulée pour vice du consentement de l’employeur, la rupture produit les effets d’une démission, l’argument du salarié selon lequel toute démission doit résulter d’une manifestation de volonté claire et non équivoque n’ayant pas été retenu par les juges. En pratique, le salarié devra donc rembourser à l’employeur l’indemnité de rupture qu’il a perçue, et, s’agissant d’une démission, lui verser une indemnité compensatrice correspondant au préavis qu’il aurait dû effectuer.
Conseil.
Deux points peuvent être relevés :
il est rare que le vice du consentement de l’employeur soit reconnu et entraîne la nullité de la RCI. En pratique, il est plus souvent considéré comme non établi, notamment au regard du caractère déterminant pour l’employeur de l’élément caché par le salarié (Cass. soc. 11-5-2022 n° 20-15.909) ;
et surtout, c’est la 1e fois, à notre connaissance, que les juges font produire à cette nullité les effets d’une démission. Cette solution est toutefois logique, sachant que, en cas de nullité d’une RCI pour vice du consentement du salarié, la rupture est un licenciement sans CRS.
Une homologation refusée ?
Les faits.
Dans cette affaire, la demande d’homologation d’une RCI est déclarée irrecevable au regard du montant des salaires figurant sur le formulaire de rupture. L’employeur fournit alors à l’administration des informations complémentaires, sans modification des montants de salaires, et obtient l’homologation.
Le salarié demande la nullité de la RCI : il estime que, puisque l’homologation d’une 1e RCI a été refusée, une autre convention de RCI doit être établie, avec un nouveau délai de rétractation, comme le prévoit la jurisprudence (Cass. soc. 13-6-2018 n° 16-24.830) .
La solution.
Sa demande est rejetée. Pour les juges, les explications de l’employeur ne nécessitaient pas de modification de la convention de RCI : son homologation obtenue sur la base des explications données par l’employeur après la décision d’irrecevabilité était donc valable, et les formalités substantielles de la RCI avaient été respectées (Cass. soc. 19-6-2024 n° 22-23.143) .
On peut noter que la Cour de cassation a aussi déjà jugé valable la convention de RCI homologuée par l’administration après le retrait d’une décision initiale de refus : dans cette affaire, l’administration avait retiré son refus après avoir obtenu les informations complémentaires qu’elle avait demandées à l’employeur (Cass. soc. 12-5-2017 n° 15-24.220) .
Conseil.
Cet arrêt illustre l’interprétation restrictive des cas de nullité de la RCI pour non-respect de la procédure : entretien préalable, remise d’un exemplaire de la RCI (Cass. soc. 6-2-2013 n° 11-27.000) et respect du délai de rétractation (Cass. soc. 19-10-2017 n° 15-27.708) . Il faut toutefois noter que, ici, les éléments ayant conduit au consentement du salarié n’étaient pas modifiés.