Le projet de loi ratifiant diverses ordonnances de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel et portant diverses mesures d'ordre social (Loi 2018-771 du 5-9-2018) a été présenté en Conseil des ministres le mercredi 13 novembre, puis déposé le jour même à l'Assemblée nationale et renvoyé à la Commission des affaires sociales. Son examen en séance publique n’est pas encore programmé.
S'il prévoit la ratification de trois ordonnances prévues par la loi Avenir professionnel, il comporte aussi diverses mesures que nous présentons sommairement ci-après.
Les trois ordonnances dont la ratification est prévue sont :
- l’ordonnance 2019-116 du 20 février 2019 portant transposition de la directive (UE) 2018/957 du Parlement européen et du Conseil du 28 juin 2018 modifiant la directive 96/71/CE concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services ;
- l'ordonnance 2019-861 du 21 août 2019 visant à assurer la cohérence de diverses dispositions législatives avec la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel ;
- l'ordonnance 2019-893 du 28 août 2019 portant adaptation des dispositions de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel aux collectivités d'outre-mer régies par l'article 73 de la Constitution et à Saint-Barthélemy, Saint‑Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon.
intéressement et participation
- Les accords d’intéressement pourraient être conclus pour une durée comprise entre un à trois ans, au lieu de trois ans actuellement, et pourraient être reconduits pour une durée égale à leur durée initiale.
Rappelons que l’article 7 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 prévoit de conditionner les exonérations fiscales et sociales prévues pour la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat à la mise en œuvre d’un accord d’intéressement. Dans ce cadre, les accords d’intéressement conclus entre le 1er janvier 2020 et le 30 juin 2020 pourraient porter sur une durée comprise entre un an et trois ans.
- Intéressement : le renvoi vers les règles de franchissement de seuils serait rectifié.
Comme en matière de participation et de plans d'épargne salariale, il serait renvoyé, pour le calcul de l'effectif en matière d'intéressement, à la totalité de l’article L 130-1 du CSS et non plus seulement au I de cet article, qui concerne le décompte des effectifs. Les règles prévues au II pour les modalités de franchissement d’un seuil d’effectif à la hausse ou à la baisse seraient couvertes par le renvoi.
- L’obligation d’affecter la participation à un plan d’épargne salariale serait clarifiée.
L'article L 3323-2 serait modifié et indiquerait que l’accord « prévoit » l’affectation de la participation à un plan d’épargne salariale. Il s'agirait de tenir compte du fait qu'il n'y a plus depuis la loi Pacte du 22 mai 2019 d'autre possibilité d'affectation.
Conditions de travail
- La formation pratique et appropriée à la sécurité existant au bénéfice des travailleurs (nouveaux embauchés, travailleurs changeant de poste de travail ou de technique, travailleurs temporaires, et, à la demande du médecin du travail, travailleurs qui reprennent leur activité après un arrêt de travail d'une durée d'au moins 21 jours) serait précisée dans sa finalité et dans son contenu.
Un nouvel article L 4141-2-1 serait inséré à cette fin dans le Code du travail.
- La période de nuit pourrait être réduite dans les commerces de détail alimentaires situés en dehors des zones touristiques internationales (ZTI).
Le Gouvernement pourrait prendre par ordonnance, dans les 18 mois à compter de la publication de la loi, des mesures pour modifier la législation applicable en matière de travail de nuit pour les commerces de détail alimentaires situés en dehors des zones touristiques internationales (ZTI).
Formation professionnelle
- Le régime juridique des fonds d’assurance formation des non-salariés serait calé sur celui des opérateurs de compétences.
- Les modalités du débit du compte personnel de formation du demandeur d’emploi seraient définies par décret.
Les conditions de débit du CPF devraient être définies par décret, sans pouvoir, comme actuellement, dépasser le montant de l’action réalisée et des droits inscrits sur son compte.
Rupture du contrat de travail
- L’indemnisation des pères et mères dont le licenciement est jugé nul en raison d’une méconnaissance de leur statut protecteur liée à la grossesse, la maternité, la paternité ou l’adoption serait clarifiée.
il s'agirait de corriger une malfaçon de l’ordonnance 2017-1387 du 22 septembre 2017 en rétablissant un deuxième alinéa à l’article L 1225-71 du Code du travail relatif à l’indemnisation des mères et des pères dont le licenciement est jugé nul en raison de la méconnaissance de leur statut protecteur lié à la grossesse, la maternité, la paternité ou l’adoption.
- Licenciement avec plan de sauvegarde de l’emploi : le CSE serait consulté sur la santé et la sécurité dès la présentation du projet.
La rédaction actuelle de l’article L 1233-30, I du Code du travail impose à l’employeur de réunir et de consulter le CSE, d’une part sur l’opération projetée et ses modalités d’application, d’autre part sur le projet de licenciement collectif. Les conséquences du projet en matière de santé, de sécurité ou de conditions de travail sont, actuellement, examinées au stade de la consultation sur le projet de licenciement : le projet de loi prévoit que ce point serait examiné en amont, au stade de la consultation sur le projet de restructuration des effectifs.
Représentation du personnel
- Le projet de loi envisage de supprimer l’obligation pour l’employeur de transmettre les procès-verbaux de carence des élections professionnelles à l’inspecteur du travail. Ainsi, ces derniers ne devraient plus être adressés qu’au ministre chargé du travail.
- Les modalités d’appréciation du franchissement du seuil de 300 salariés conduisant le CSE à disposer de moyens de fonctionnement élargis seraient précisées.
Le projet de loi prévoit d’étendre les modalités d’appréciation du franchissement du seuil de 300 salariés applicables en matière d’attributions du CSE aux règles régissant son fonctionnement.
- La mesure de la représentativité syndicale au niveau du groupe serait harmonisée.
A l’avenir, pour apprécier la représentativité syndicale, il faudrait toujours se référer aux dernières élections organisées dans les entreprises ou établissements visés par l’accord, en additionnant l’ensemble des suffrages obtenus, même en présence d’un accord de groupe au périmètre identique.
- La liste des syndicats représentatifs, arrêtée par le ministre chargé du travail, pourrait être commune à plusieurs branches. La même mesure concernerait les organisations patronales.
Négociation collective
- Les conditions de validité des accords interbranches seraient précisées
La validité d’un accord négocié et conclu au niveau de plusieurs branches serait ainsi appréciée conformément à l’article L 2232-6 du Code du travail relatif aux accords de branche sous les deux réserves suivantes : le seuil de 30 % correspondant à la majorité d’engagement et celui de 50 % permettant l’exercice du droit d’opposition seraient appréciés à l’échelle de chacune des branches comprises dans le périmètre de l’accord.
- Un délai supplémentaire serait accordé pour conclure une convention commune en cas de regroupement de champs conventionnels.
L’accord collectif regroupant le champ de plusieurs conventions existantes ou un autre accord conclu dans la branche issue du regroupement à porter ce délai jusqu’à 7 ans.
Mesures pour l'emploi
- Insertion par l’activité économique : l’agrément par Pôle emploi serait supprimé.
- La préparation opérationnelle à l’emploi serait étendue aux personnes en recherche d’emploi non inscrites sur la liste des demandeurs d’emploi et aux travailleurs handicapés des entreprises adaptées.
- L’expérimentation permettant de conclure un seul CDD ou contrat de travail temporaire pour remplacer plusieurs salariés absents serait prolongée.
La conclusion de ces contrats dérogatoires, prévue par l'article 53 de la loi Avenir professionnel du 5 septembre 2018 dans certains secteurs déterminés par décret, pourrait intervenir jusqu’au 1er janvier 2023.
Pour un commentaire exhaustif de ce projet : voir notre FRS 24/19, en ligne dans votre Navis social.