Une société allemande confie à une société française la distribution de ses produits en France. Des années plus tard, la première rompt le contrat et la seconde lui réclame le paiement d’une indemnité de rupture (C. com. art. L 134-12). La société allemande refuse, faisant valoir que la société française revend des produits de différents fournisseurs et dispose d’une clientèle propre, ce qui exclut qu’elle bénéficie du statut d’agent commercial et d’une indemnité de rupture.
Cet argument est rejeté : une même personne peut à la fois exercer des activités d'agent commercial, pour lesquelles elle bénéficie du statut d’agent commercial (C. com. art. L 134-1 s.), et des activités d'une autre nature la conduisant à détenir une clientèle propre, à la condition que les premières soient exercées de façon indépendante. Or la société allemande ne soutenait pas que l'activité commerciale propre de la société française était de nature à l'empêcher d'exercer son activité d'agent commercial de manière indépendante.
A noter :
Rappelons que le statut d’agent commercial fixé par le Code de commerce résulte de la transposition en droit interne de la directive européenne 86/653 du 18 décembre 1986, relative à la coordination des droits des Etats membres de l'UE concernant les agents commerciaux indépendants.
Cette directive laissait la possibilité aux Etats membres d’exclure du champ d'application de la protection qu’elle instituait les personnes exerçant une activité d'agent commercial à titre accessoire (Dir. art. 2, 2). Dans cet arrêt, la Cour de cassation rappelle que la France a utilisé cette faculté mais dans des termes spécifiques : lorsque l'activité d'agent commercial est exercée en exécution d'un contrat écrit passé entre les parties à titre principal pour un autre objet, celles-ci peuvent décider par écrit que le statut n’est pas applicable à la partie correspondant à l'activité d'agence commerciale (C. com. art. L 134-15). Ce texte ne vise pas, relève la Haute Juridiction, la situation qui lui était soumise : les activités d'une autre nature exercées par l'agent commercial ne procédaient pas ici de l'exécution du contrat passé avec son mandant, de sorte que la situation n'était pas exclusive du bénéfice du statut d'agent commercial.
Puisque la situation ne tombait pas sous le coup de cette exclusion ni d’autres exclusions (cf. Dir. art. 2 ; C. com. art. L 134-1, al. 2), il y avait lieu de faire application de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne. Aux termes de celle-ci, les personnes exerçant une activité d'agent commercial doivent être considérées comme relevant du champ d'application de la directive, quand bien même cette activité serait cumulée à une activité d'une autre nature ; mais le cumul, par une même personne, des activités d'agent commercial avec des activités d'une autre nature ne doit pas conduire à affecter sa qualité d'intermédiaire indépendant (CJUE 21-11-2018 aff. 452/17 : RJDA 2/19 n° 82). Même si cette condition est satisfaite, l’intéressé n’est protégé que pour ses activités d’agent commercial.
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