Une maison est vendue, le vendeur s’en réservant le droit d’usage et d’habitation viager. Huit ans après la vente, l’acheteur loue la maison au vendeur. Le vendeur assigne l’acheteur en annulation du bail, en remboursement des loyers versés et en indemnisation de son préjudice moral. L’acheteur demande le paiement de l’arriéré locatif.
La cour d’appel de Dijon rejette la demande du vendeur. Selon elle, le vendeur a renoncé de manière tacite au droit d’usage et d’habitation qu’il s’était réservé sur l’immeuble aux motifs qu’il a signé un contrat de bail, payé un loyer mensuel pendant 4 ans et avait sollicité par écrit un délai pour apurer l’arriéré locatif.
Cassation : la renonciation n’est pas intervenue dans les formes prévues par l’acte de vente. Selon les termes de l’acte, le vendeur peut renoncer au droit d’usage et d’habitation par lettre recommandée avec avis de réception envoyée à l’acheteur 6 mois à l’avance : la renonciation ne pouvait donc pas avoir lieu de manière tacite.
A noter :
Le crédirentier peut valablement renoncer à percevoir la rente (ou à son droit d’usage et d’habitation dans l’arrêt commenté) et dispenser ainsi le débirentier du paiement des arrérages ultérieurs (Cass. 1e civ. 15-6-1973 n° 72-12.811 : Bull. civ. I n° 205). Mais cette renonciation ne se présume pas. Le silence et l'inaction du crédirentier ne constituent pas des faits positifs et non équivoques témoignant d'une volonté manifeste de renoncer aux prestations définies dans l'acte de vente (Cass. 3e civ. 4-1-1991 n° 89-14.858).
L’arrêt commenté est rendu au visa de l’ancien article 1134 du Code civil (devenu art. 1103), qui dispose que « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ». La clause de l’acte de vente fixait les modalités de la renonciation, qui ne pouvait donc pas être tacite.