Un donateur, après avoir gratifié son petit-fils de la nue-propriété d’un appartement, d’une cave et d’un parking, lui reproche l’occupation effective des biens donnés. Il cherche alors à obtenir la révocation judiciaire de la donation pour inexécution des charges (C. civ. art. 953), arguant de sa réserve d’usufruit.
Peine perdue ! Dans un premier temps, la cour d’appel distingue la réserve d’usufruit des charges susceptibles d’entraîner la révocation en cas d’inexécution. Ces dernières sont déterminantes pour le consentement du donateur et contraignantes pour le donataire. Or, la réserve d’usufruit n’impose par elle-même aucune charge ou obligation particulière au donataire, sauf stipulation particulière.
Dans un deuxième temps, les juges relèvent que l’acte de donation ne comprend aucune charge particulière imposée au donateur. La liste des « charges et conditions » auxquelles le donateur s’oblige figure dans un paragraphe dédié et s’apprécie de manière limitative. Peu importe que :
- la clause « Action révocatoire » vise l’hypothèse de la non-exécution des charges de la donation. Celle-ci est systématiquement insérée, selon elle, même en l’absence de charges particulières, sans que sa rédaction soit pour autant modifiée. Elle fait le même constat à propos des clauses de droit de retour, d’interdiction d’aliéner et d’hypothéquer et d’exclusion de communauté figurant audit acte ;
- la clause d’interdiction d’aliéner et d’hypothéquer soit justifiée « en raison des charges et réserves ». Une telle rédaction, en des termes généraux, ne permet pas de valider l’existence de charges incombant au donataire et s’explique par la réserve d’usufruit prévue au profit du donateur.
A noter :
La possibilité pour le donateur de démembrer son droit de propriété en se réservant l’usufruit des biens donnés ne doit pas se confondre avec celle qui lui est également reconnue d’imposer des charges au donataire. En l’espèce, le paragraphe « charges et conditions » de l’acte listait l’absence de recours sur l’état du bien, l’acceptation des éventuelles servitudes, l’obligation de l’usufruitier d’effectuer à ses frais les réparations sur le bien donné, la reprise ou non des contrats, de l’assurance, le paiement des impôts et charges de copropriété à la date d’entrée en jouissance du donataire, mais nullement la réserve d’usufruit elle-même, et ce, à juste titre. Par conséquent, l’occupation par le donataire des biens donnés au mépris des droits du donateur usufruitier ne permettait pas à ce dernier d’obtenir la révocation de l’acte pour inexécution des charges. Inutile pour lui de proposer une lecture exégétique des clauses usuelles faisant références aux « charges » de la donation.
Par ailleurs, la remarque de la cour d’appel sur la clause « Action révocatoire » à propos de laquelle « il est manifeste que celle-ci [l’hypothèse de la non-exécution des « charges de la présente donation »] y est insérée systématiquement, même en l’absence de charges particulières du donataire » doit, en pratique, sensibiliser les rédacteurs à une personnalisation de leurs actes.
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