Impartialité objective du juge des libertés et de la détention
Le même juge ne peut dans un même dossier intervenir successivement en qualité de juge d’instruction et de juge des libertés et de la détention, et il ne saurait être fait grief au mis en examen, placé en détention provisoire, de ne pas avoir engagé une procédure de récusation dès lors qu’en l’absence de convocation ou de débat contradictoire il n’est pas établi qu’il ait eu connaissance de l’identité juge des libertés et de la détention avant notification de l’ordonnance ayant refusé sa mise en liberté (Cass. crim. 28-6-2022 n° 22-82.698 F-B).
Cour d’assises
Aucune disposition d'adaptation de la procédure criminelle n’est prévue au Code de procédure pénale pour le jugement, par la cour d'assises, saisie du seul renvoi d'un accusé auquel est reproché uniquement un délit connexe à un crime, de sorte qu’il y a lieu d'établir une feuille de questions et une feuille de motivation. Toutefois, s’agissant d’une nullité soumise à grief, celle-ci n’est pas encourue dès lors que l'absence d'établissement de ces feuilles n’a pas porté atteinte aux intérêts de l’intéressé (Cass. crim. 29-6-2022 n° 21-85. 699 F-B).
Menaces de commettre un crime ou un délit
Se rend coupable de menaces aggravées l’individu qui, devant des professionnels de santé dans l’exercice de leurs fonctions, se prévaut de son appartenance à Daesh et de son intention de repartir en Syrie (Cass. crim. 28-6-2022 n° 21-85.321 F-B). En effet, en se prévalant de son appartenance personnelle à une organisation terroriste responsable de plusieurs attentats récemment commis en France et de son intention de la rejoindre, le prévenu avait pour objectif d'intimider et de menacer ses interlocuteurs par l'annonce de possibles actions de la nature de celles que cette organisation conduit et promeut habituellement, constitutives de crimes ou de délits contre les personnes ou les biens, s'agissant d'homicides ou de destructions.
Preuve de la rébellion
L’affaire Boutaffala c/ Belgique concerne une condamnation pénale par les juridictions belges pour « rébellion et coups à l’agent venu en renfort » (CEDH 28-6-2022 n° 20762/19, Boutaffala c/ Belgique). Les faits ont donné lieu à deux procédures, l’une à charge du requérant, l’autre à charge des policiers qui avaient procédé à l’interpellation.
La Cour retient la violation de l’article 6 § 1 : « En l’espèce, force est de constater que la cour d’appel a accordé un poids décisif dans la condamnation du requérant aux dépositions à charge des policiers ayant procédé à l’interpellation du requérant et aux témoignages des autres policiers présents sur les lieux de cette interpellation pourtant reconnue contraire à l’article 3 de la Convention » (§ 88). Elle juge que les juridictions belges n’ont pas assuré au requérant une procédure équitable, portant notamment atteinte au principe selon lequel le doute profite à l’accusé, qui implique que la charge de la preuve incombe à l’accusation et qu’une personne poursuivie ne soit pas contrainte de prouver son innocence.
Appel correctionnel
Dès lors que des témoins, régulièrement cités devant la cour d'appel, n'ont pas été entendus par le tribunal, ils doivent l'être par la juridiction du second degré, peu important qu'ils n'aient pas été cités en première instance, l'article 513 du code de procédure pénale ne prévoyant pas une telle restriction (Cass. crim. 29-6-2022 n° 21-85.470). Selon ce texte, devant la cour d'appel, les témoins sont entendus dans les règles prévues par les articles 435 à 457 du Code de procédure pénale, le ministère public pouvant s'y opposer si ces témoins ont déjà été entendus par le tribunal. En refusant d'entendre trois témoins, au motif qu'ils n'avaient pas été cités devant le tribunal correctionnel, en s’appuyant sur le fait que le prévenu était déjà assisté par le même avocat, l'abstention de la défense de les faire citer en première instance établissant le caractère non déterminant de ces déclarations par rapport à la décision à prendre, la cour a méconnu le sens et la portée de l’article 513 du Code de procédure pénale et du principe ci-dessus rappelé.
Etrangers
Se rend coupable du délit de pénétration non autorisée sur le territoire national après interdiction judiciaire du territoire la personne qui embarque volontairement à bord d'un avion à destination de la France, pays où elle savait qu'elle ne pouvait entrer en vertu d'une décision juridictionnelle, puis débarque de cet avion à son arrivée, où elle a été placé en zone d'attente, lieu sous contrôle administratif et juridictionnel national, puis refuse son réacheminement, ce qui a justifié son placement en garde à vue (Cass. crim. 29-6-2022 n° 21-84.321 F-B).
Mandat d’arrêt européen
La CJUE précise que l’autorité judiciaire d’émission d’un mandat d’arrêt européen n’a aucune obligation de transmettre à la personne visée par ce mandat la décision nationale relative à son arrestation et les informations relatives aux possibilités de recours contre cette décision, tant que cette personne se trouve dans l’État membre d’exécution du mandat d’arrêt et n’a pas été remise aux autorités compétentes de l’État membre d’émission de celui-ci (CJUE 30-6-2022 req. C-105/21).
Adoption du règlement renforçant les pouvoirs d’Europol
Afin d’adapter les pouvoirs de l’agence aux nouvelles menaces criminelles, le Conseil de l’Europe a adopté le 8 juin 2022 le règlement (UE) 2022/991 modifiant le règlement (UE) 2016/794 en ce qui concerne la coopération d’Europol avec les parties privées, le traitement de données à caractère personnel par Europol à l’appui d’enquêtes pénales et le rôle d’Europol en matière de recherche et d’innovation.
Le texte renforce les pouvoirs d’Europol en lui permettant de développer la recherche et l’innovation, y compris en matière d’intelligence artificielle, de traiter de grandsensembles de données pour soutenir les États dans leur lutte contre la criminalité grave, en particulier par le développement de la coopération avec les acteurs privés pour recevoir ces données directement. Europol pourra encore proposer l’introduction par les États membres de signalements informatifs dans le système d'information Schengen (SIS).
Les possibilités de coopération d'Europol avec les pays tiers sont étendues, dont la possibilité d'échanger des données à caractère personnel avec des pays où des garanties appropriées existent. Le règlement prévoit aussi qu’Europol collaborera étroitement avec le Parquet européen en soutenant, à la demande de ce dernier, les enquêtes qu'il mène et en signalant sans délai tout comportement délictueux relevant de sa compétence.
Enfin, la directrice exécutive d'Europol pourra proposer l'ouverture d'une enquête nationale sur des crimes non-transfrontières portant atteinte à un intérêt commun qui fait l'objet d'une politique de l'UE. Il reviendra aux autorités nationales de décider s'il convient de donner suite à cette requête.
Blanchiment
Le Conseil de l’Union européenne a rendu publique sa position relative à la création de l’autorité de lutte contre le blanchiment de capitaux (Communiqué du Conseil de l’UE du 29-6-2022). Elle devrait contribuer, entre autres tâches, à l'harmonisation et à la coordination des pratiques de surveillance dans les secteurs financier et non financier, à la supervision directe des entités financières à haut risque et transfrontières ainsi qu'à la coordination des cellules de renseignement financier.
Pour aller plus loin : voir la revue AJ pénal