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Une semaine de jurisprudence sociale à la Cour de cassation

Nous avons sélectionné pour vous les arrêts les plus marquants rendus cette semaine par la Cour de cassation.


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©Gettyimages

Embauche

  • Aux termes de l'article L 1242-12, alinéa 1er, du Code du travail, le contrat de travail à durée déterminée est établi par écrit et comporte la définition précise de son motif. A défaut, il est réputé conclu pour une durée indéterminée. En l'absence de contrat écrit, l'employeur ne peut écarter la présomption légale instituée par ce texte selon laquelle le contrat doit être réputé conclu pour une durée indéterminée (Cass. soc. 8-2-2023 n° 21-18.754 F-D).

  • Est réputé à durée indéterminée le contrat de travail à durée déterminée qui ne comporte pas la définition précise de son motif. Cette exigence de précision quant à la définition du motif implique nécessairement que le nom et la qualification du salarié remplacé figurent dans le contrat lorsqu'il s'agit d’un contrat à durée déterminée de remplacement. Dès lors, une cour d’appel ne saurait débouter le salarié de ses demandes en requalification de son contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée alors qu’il ressortait de ses constatations que le contrat litigieux ne comportait pas la qualification du salarié remplacé (Cass. soc. 8-2-2023 n° 21-14.444 F-D).

Exécution du contrat

  • Il résulte de l'article L 1245-2 du Code du travail que le montant minimum de l'indemnité de requalification d'un contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée est calculé selon la moyenne de salaire mensuel, dû au titre du contrat dans le dernier état de la relation de travail avant la saisine de la juridiction prud'homale. Cette moyenne de salaire mensuel doit être déterminée au regard de l'ensemble des éléments de salaire, y compris lorsqu'ils ont une périodicité supérieure au mois. Une cour d’appel ne saurait donc, pour fixer à une certaine somme le montant de l'indemnité de requalification, retenir que la salariée a reçu une rémunération mensuelle brute moyenne d'un montant de 1 618,16 euros au cours de l'année 2020 alors qu'elle avait fixé la rémunération de base de la salariée à 2 215,89 euros par mois en raison de la requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée à temps complet (Cass. soc. 8-2-2023 n° 21-16.824 FS-B).

  • La requalification de la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée qui confère au salarié le statut de travailleur permanent de l'entreprise a pour effet de replacer ce dernier dans la situation qui aurait été la sienne s'il avait été recruté depuis l'origine dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée. Il en résulte que les sommes qui ont pu lui être versées en sa qualité « d'intermittent », destinées à compenser la situation dans laquelle il était placé du fait de son contrat à durée déterminée, lui restent acquises nonobstant une requalification ultérieure en contrat à durée indéterminée. Dès lors  (Cass. soc. 8-2-2023 n° 21-17.971 FS-B) :

    - le salarié peut prétendre à des rappels de primes d'ancienneté, de fin d'année et de sujétion, sans qu'il y ait lieu de tenir compte des sommes versées par l'employeur en exécution des divers contrats à durée déterminée au titre du salaire de base ;

     - les sommes perçues par le salarié au titre du salaire de base brut « d’intermittent » qui lui sont définitivement acquises doivent être prises en compte pour déterminer le montant de indemnités conventionnelle de licenciement et pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

    - l'indemnité de préavis doit être calculée au regard des sommes que le salarié aurait perçues en application du statut de travailleur permanent qui lui a été reconnu.

Durée du travail

  • L'article L 3122-2 alinéa 5 du Code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi 2016-1088 du 8 août 2016, dispose que lorsque l'accord de modulation s'applique aux salariés à temps partiel, il prévoit les modalités de communication et de modification de la répartition de la durée et des horaires de travail. L'article B.13 de l'avenant du 12 juin 2013 à la convention collective régionale des vins de Champagne du 9 juillet 1985, intitulé « contrat de travail à temps partiel », comporte plusieurs articles. Ainsi, l'article B132 définit de manière générale le régime du temps partiel aménagé sur tout ou partie de l'année. Par ailleurs, les articles B131 et B133, qui, pour le premier, rappelle les principes généraux en matière de travail à temps partiel, et, pour le second, définit le régime des heures complémentaires, sont de portée générale et se rapportent uniquement à la modification des horaires et de la durée de travail. Il en ressort que ces dispositions, qui envisagent uniquement la modification de la durée et des horaires de travail, ne précisent pas de quelle manière la répartition initiale de la durée et des horaires de travail dans le cadre du système de modulation mis en œuvre est communiquée aux salariés engagés à temps partiel. Dès lors, les dispositions de l'article B.13 de l'avenant du 12 juin 2013 ne permettent pas de satisfaire aux exigences de l'article L 3122-2 alinéa 5 du Code du travail (Cass. soc. 8-2-2023 n°s 21-20.553 F-D et 21-20.554 F-D).

  • Une cour d’appel ne saurait débouter le salarié de sa demande en requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat à temps complet alors qu'elle avait constaté que l'employeur avait unilatéralement diminué le temps de travail et que cette diminution n'avait donné lieu à aucun avenant. La cour d’appel ne pouvait en effet écarter la présomption de travail à temps complet qui en résultait sans rechercher si l'employeur justifiait de la durée de travail exacte convenue et que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur (Cass. soc. 8-2-2023 n° 21-15.863 F-D).

Paie

  • La visite de reprise à l'issue de laquelle le salarié a été déclaré apte à reprendre le travail avec aménagement à temps partiel thérapeutique met fin à la période de suspension du contrat de travail provoquée par la maladie ou l'accident. Le salarié dont l'employeur a accepté le principe d'une reprise de son travail en temps partiel thérapeutique peut prétendre de la part de celui-ci au paiement du salaire dû en contrepartie de l'activité à temps partiel exercée dans ce cadre. Ayant constaté qu'il ne faisait pas débat que le salarié avait transmis régulièrement à son employeur entre le 1er novembre 2006 et le 30 novembre 2011, avant la conclusion de l'avenant pour un passage à temps partiel, les certificats médicaux nécessaires au maintien de sa situation en mi-temps thérapeutique, l'intéressé qui invoquait l'absence de prise en charge par son organisme de sécurité sociale des indemnités journalières durant les périodes non travaillées de son mi-temps thérapeutique, n'était pas fondé à réclamer à l'employeur le paiement des salaires durant ces périodes non travaillées (Cass. soc. 8-2-2023 n° 21-16.433 FS-D).

Rupture du contrat

  • Une cour d'appel ne peut pas requalifier la faute grave en faute simple en s'appuyant sur un motif tiré de l'ancienneté, insuffisant à lui seul à écarter la qualification de faute grave, alors qu'elle constate la pratique par le salarié d'un mode de management de nature à impressionner et nuire à la santé de ses subordonnés, ce dont il résulte que l'intéressé a commis une faute rendant impossible son maintien dans l'entreprise même pendant la durée limitée du préavis (Cass. soc. 8-2-2023 n° 21-11.535 F-D).

Négociation collective

  • Une convention collective, si elle manque de clarté, doit être interprétée comme la loi, c'est-à-dire d'abord en respectant la lettre du texte, ensuite en tenant compte d'un éventuel texte législatif ayant le même objet et, en dernier recours, en utilisant la méthode téléologique consistant à rechercher l'objectif social du texte (Cass. soc. 8-2-2023 n° 21-16.805 FS-B et n° 21-15.314 FS-B).

Santé et sécurité

  • L'atteinte à la dignité du salarié constitue pour l'employeur un manquement grave à son obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de travail. L'employeur, qui avait bénéficié d'une dérogation l'autorisant à poursuivre l'utilisation de l'amiante malgré l'entrée en vigueur de l'interdiction de cette substance, et qui a continué, en toute illégalité, à utiliser ce matériau pendant 3 ans alors qu'il n'était plus titulaire d'aucune autorisation dérogatoire, a ainsi manqué à son obligation d'exécuter de bonne foi les contrats de travail et doit être condamné à indemniser le salarié (Cass. soc. 8-2-2023 n° 21-14.451 FP-BR, n° 21-14.534 FP-D).

  • Si la responsabilité de l'entreprise utilisatrice, qui n'est pas liée au salarié mis à sa disposition par un contrat de travail, ne peut pas être recherchée sur le fondement de l'obligation de sécurité à la charge de l'employeur, sa responsabilité peut néanmoins être engagée au titre de la responsabilité extracontractuelle, dès lors que sont établies des fautes ou négligences de sa part dans l'exécution des obligations légales et réglementaires mises à sa charge en sa qualité d'entreprise utilisatrice, qui ont été la cause du dommage allégué. Ayant retenu l'existence d'un lien de causalité entre les fautes de l'entreprise utilisatrice qu'elle a constatées et le préjudice d'anxiété personnellement subi par le salarié résultant de son exposition à l'amiante générant un risque élevé de développer une pathologie grave, la cour d'appel a pu condamner l'entreprise utilisatrice à indemniser l'intéressé de ce préjudice, sans qu'il soit nécessaire que la responsabilité des employeurs sous-traitants au titre de l'obligation de sécurité ait été retenue (Cass. soc. 8-2-2023 nos 20-23.312 PB-PBR, 20-23.313 FP-D, 20-23.314 FP-D, 20-23.3015 FP-D, 20-23.316 FP-D, 20-23.317 FP-D, 20-23.318 FP-D).

  • Lorsque l'avis d'inaptitude physique mentionne expressément que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l'emploi, l'employeur est dispensé de rechercher et de lui proposer des postes de reclassement (Cass. soc. 8-2-2023 n° 21-19.232 FS-B).

  • Le médecin du travail ayant mentionné que l'état de santé de la salariée faisait obstacle à tout reclassement dans son entreprise, alors qu'était constatée l'existence d'un groupe de reclassement, l'employeur n'était pas dispensé de rechercher un reclassement au sein de ce groupe (Cass. soc. 8-2-2023 n° 21-11.356 FS-D).

  • Les dispositions d'ordre public du Code du travail font obstacle à ce que l'employeur prononce le licenciement d'un salarié déclaré inapte par le médecin du travail pour un motif autre que l'inaptitude, peu important que l'employeur ait engagé antérieurement une procédure de licenciement pour une autre cause. En conséquence, la cour d'appel ne pouvait pas décider que la circonstance que l'inaptitude définitive du salarié à occuper son emploi ait été constatée par le médecin du travail ne privait pas la société de se prévaloir d'une faute lourde à l'issue de la procédure disciplinaire engagée antérieurement (Cass. soc. 8-2-2023 n° 21-16.258 FS-B).

  • La convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie n'interdit pas le licenciement du salarié pendant la suspension de son contrat de travail pour maladie pour d'autres causes que la maladie, la garantie d'emploi pour une durée déterminée n'étant prévue que pour le licenciement à la suite d'une absence pour maladie et nécessité de remplacement, et prévoit les conditions de l'attribution de l'indemnité de préavis en l'étendant pour certains licenciements spécifiques. Une cour d'appel ne peut pas dire le licenciement pour insuffisance professionnelle d'un salarié dépourvu de cause réelle et sérieuse car prononcé en violation de la garantie d'emploi conventionnelle en retenant que les dispositions conventionnelles n'ont pas pour seul objet de déterminer l'indemnisation due au salarié malade, mais offrent aussi une véritable garantie d'emploi en réservant la possibilité de licencier aux seuls cas justifiés par un motif économique (si licenciement collectif), ou par la suppression du poste occupé par le salarié malade, ou encore par la nécessité de procéder au remplacement du salarié absent à l'expiration de la durée d'indemnisation à plein tarif (Cass. soc. 8-2-2023 n° 21-16.805 FS-B).

Statuts particuliers

  • Seul le VRP engagé à titre exclusif par un seul employeur a droit à une ressource minimale forfaitaire. Le caractère exclusif de l'engagement du représentant s'apprécie au regard des dispositions contractuelles. Dès lors : 

    • une cour d’appel ne saurait requalifier le contrat de travail de VRP non exclusif du salarié en contrat de travail de VRP exclusif et condamner l'employeur à payer au salarié des sommes à titre de rappel de salaire sur la base du minimum garanti, alors qu'elle avait constaté que le contrat de travail du salarié ne comportait pas de clause d'exclusivité et qu'en son article 3, il autorisait l'intéressé à travailler pour un autre employeur dès lors qu'il ne s'agissait pas d'une entreprise concurrente, ce dont il résultait que le salarié n'était pas soumis à une clause d'exclusivité et ne pouvait prétendre au bénéfice de la rémunération minimale forfaitaire (Cass. soc. 8-2-2023 n° 20-15.515 FS-B) ; 

    • une cour d’appel, appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve produits par les parties, qui a constaté que les trois sociétés constituaient en réalité le seul et même employeur de la salariée et qui a fait ressortir que l'activité de l'intéressée, qui l'occupait à temps plein, excluait toute activité pour un autre employeur, a pu décider que la salariée pouvait solliciter le bénéfice de la ressource minimale forfaitaire (Cass. soc. 8-2-2023 n° 20-23.661 FS-B).

  • La requalification de la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée qui confère à la salariée le statut de travailleur permanent de la société a pour effet de replacer cette dernière dans la situation qui aurait été la sienne si elle avait été recrutée depuis l'origine dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée. Les sommes qui ont pu lui être versées, en sa qualité de pigiste, destinées à compenser la situation dans laquelle elle était placée du fait de ses contrats à durée déterminée, lui restent acquises nonobstant une requalification ultérieure en contrat à durée indéterminée (Cass. soc. 8-2-2023 n° 21-10.270 FS-B).

Contrôle - contentieux

  • La durée de la prescription étant déterminée par la nature de la créance invoquée, l'action en paiement d'un rappel de salaires fondée sur l'invalidité d'une convention de forfait en jours est soumise à la prescription triennale prévue par l'article L 3245-1 du Code du travail (Cass. soc. 8-2-2023 n° 20-22.994 F-D).

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© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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