Une transaction a pour objet de mettre fin à toute contestation née ou à naître résultant de l'exécution ou de la rupture du contrat de travail, au moyen de concessions réciproques. Elle évite à l'employeur d'avoir ensuite à faire face à un procès. Elle éteint donc définitivement les contestations qui en font l'objet. En principe, les demandes ayant un objet différent restent toutefois recevables. Quelle est la portée d'une transaction rédigée en termes généraux ? C'est sur cette question que la chambre sociale de la Cour de cassation devait de nouveau statuer.
Une transaction peut avoir une portée générale
En l'espèce, le salarié et l'employeur avaient conclu le 30 novembre 2001 une transaction aux termes de laquelle le premier déclarait être rempli de tous ses droits et ne plus avoir aucun grief à l'encontre de la société du fait de l'exécution ou de la rupture de son contrat de travail. Il avait saisi par la suite le conseil de prud'hommes d'une demande en réparation de son préjudice d'anxiété en lien avec une exposition à l'amiante, le site où il travaillait étant inscrit sur la liste des établissements ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée des travailleurs de l'amiante.
Le salarié soutenait que la reconnaissance et l'indemnisation du préjudice d'anxiété résultant d'une jurisprudence postérieure à la signature de la transaction (Cass. soc. 11-5-2010 n° 09-42.241), celui-ci ne pouvait être inclus dans son objet.
Les juges du fond, se fondant sur une interprétation stricte de la transaction et retenant que le protocole transactionnel ne pouvait pas mentionner la renonciation à se prévaloir d'un préjudice dont la reconnaissance est issue d'une création jurisprudentielle du 11 mai 2010, donc de plusieurs années postérieure à sa signature, avaient déclaré recevable la demande du salarié.
Le raisonnement est censuré par la chambre sociale de la Cour de cassation : étant donné les termes généraux de la transaction, le salarié n’était plus recevable à saisir la juridiction prud’homale d’une demande en lien avec l’exécution ou la rupture de son contrat de travail, une évolution ou un changement de jurisprudence ne pouvant pas modifier l’objet de la transaction.
Une harmonisation de jurisprudence attendue
Depuis 1997, l'assemblée plénière de la Cour de cassation retient une interprétation extensive de l'objet de la transaction, jugeant que lorsqu'un salarié et un employeur ont conclu une transaction aux termes de laquelle le premier renonce à toute réclamation relative tant à l'exécution qu'à la rupture du contrat de travail, la renonciation a une portée générale et vise toutes les conséquences de la rupture du contrat (Cass. ass. plén. 4-7-1997 n° 93-43.375).
Mais la chambre sociale continuait, dans certains arrêts, à retenir une conception restrictive de la portée de la transaction. Ainsi, elle considérait que les obligations ayant vocation à s'appliquer postérieurement à la rupture du contrat de travail n'étaient pas comprises dans l'objet de la transaction, en l'absence de dispositions expresses (voir par exemple Cass. soc. 1-3-2000 n° 97-43.471 pour une clause de non-concurrence ; Cass. soc. 8-12-2009 n° 08-41.554 pour des options sur titres).
D'autres décisions ont traduit toutefois un infléchissement vers une approche de la portée d'une transaction conforme à ce que juge l'assemblée plénière (Cass. soc. 5-11-2014 n° 13-18.984). L'arrêt du 11 janvier 2017 confirme donc l'abandon, par la chambre sociale, d'une conception restrictive de l'objet d'une transaction et sa volonté de s'inscrire dans le fil de ce que juge l'assemblée plénière de la Cour de cassation.
Frédéric SATGE
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Social n° 69590