Une femme souscrit un contrat d’assurance-vie en unités de compte (UC) et y investit plus de 143 000 €, avant de procéder à un arbitrage de ces sommes sur un produit structuré indexé sur un panier d’actions de référence coté à la Bourse de Luxembourg. Près de dix ans plus tard, elle demande le rachat de son contrat et l’assureur lui verse moins de 23 000 €.
Soutenant que le produit financier ayant servi de support au contrat n’était pas éligible à l’assurance-vie et reprochant à l’assureur d’avoir manqué à son obligation d’information et de conseil, elle lui demande réparation de son préjudice résultant de la moins-value subie. La cour d’appel la déboute.
La Cour de cassation confirme. Elle rappelle qu’en matière d’assurance sur la vie ou d’opération de capitalisation, le capital ou la rente garantis peuvent être exprimés en UC constituées de valeurs mobilières ou d’actifs (C. ass. art. L 131-1), au rang desquels figurent les obligations négociées sur un marché reconnu (C. ass. art. R 332-2, 2° sur renvoi de R 131-1, I-1°). Puis elle précise que les obligations satisfont à cette condition de négociabilité dès lors qu’elles sont admises sur un marché reconnu.
Ayant été admis à la Bourse de Luxembourg, les produits en cause doivent donc être considérés comme négociés sur un marché reconnu et, par conséquent, sont éligibles en tant qu’UC d’un contrat d’assurance-vie.
A noter :
Cet arrêt marque le troisième acte de la discussion relative à l’éligibilité à l’assurance-vie des produits structurés de type EMTN (Euro Medium Term Notes). Dans un premier temps, un assureur a contesté avec succès la décision des juges du fond d’exclure le produit concerné de l’assurance-vie au motif qu’il ne constituait pas une obligation. La Cour de cassation a en effet jugé que l’absence de garantie du capital à l’échéance n’était pas un obstacle à la qualification d’obligation (Cass. 2e civ. 23-11-2017 no 16-22.620 FS-PBI).
Dans un second temps, la cour d’appel de renvoi a dû se prononcer sur l’éligibilité de ce produit à l’assurance-vie sous l’angle du critère de protection suffisante de l’épargne investie, le souscripteur estimant que l’article L 131-1 du Code des assurances énonçait deux conditions cumulatives, à savoir faire partie de la liste prévue à l’article R 131-1 du Code précité et offrir une protection suffisante de l’épargne. Or, la Cour de cassation a jugé qu’il n’y avait en réalité qu’un seul critère, un actif remplissant la condition de protection suffisante de l’épargne investie dès lors qu’il est visé par l’article R 131-1 du même Code, comme c’était le cas pour le produit structuré en cause (Cass. 2e civ. 16-7-2020 no 19-16.922 F-PBI : BPAT 5/20 inf. 165).
Enfin, dans l’arrêt ici commenté relatif à une autre affaire, l’assurée reprochait à la cour d’appel de ne pas avoir établi le caractère négociable du produit en cause par un nombre suffisamment significatif de transactions effectives. Selon elle, les obligations devaient remplir deux conditions pour être éligibles à l’assurance-vie, à savoir être admises à la négociation sur un marché reconnu et être effectivement négociées sur ce marché. Or, pour la Cour de cassation, la seule condition requise est l’admissibilité de l’obligation sur un marché reconnu, dont découle automatiquement sa négociabilité.