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La prime d'assurance-vie versée après 70 ans ne cause pas de préjudice fiscal personnel à l'assuré

L’assuré reprochant à la banque d’avoir empêché, par sa négligence, le versement de la prime d’assurance-vie avant ses 70 ans ne peut se prévaloir d’un préjudice résultant de l’application des droits de succession, lesquels sont à la charge des seuls bénéficiaires du contrat.

Cass. com. 11-9-2024 n° 22-23.014 F-D


Par Rémy FOSSET
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©Getty Images

Quelques jours avant le 12 mars 2016, date de son 70e anniversaire, un homme souscrit par l’intermédiaire de sa banque un contrat d’assurance-vie et désigne en qualité de bénéficiaires par parts égales ses deux petits-enfants. Son versement initial de 150 000 € effectué par chèque est crédité le 8 mars 2016 sur les comptes de la banque, qui transmet les documents nécessaires à l’assureur. Ce dernier enregistre la souscription et prélève la prime le 14 mars 2016, après les 70 ans de l’assuré. Invoquant une perte de chance de transmettre la prime versée sans droit de succession, le souscripteur assuré engage la responsabilité de la banque et de l’assureur afin d’obtenir la réparation de son préjudice. Il estime en effet que leur négligence a empêché le versement avant ses 70 ans, faisant ainsi entrer la prime dans le champ d’application de l’article 757 B du CGI. La demande est rejetée en appel.

La Cour de cassation confirme. Le paiement des droits de mutation dus à la suite du décès du souscripteur d’un contrat d’assurance-vie étant à la charge des seuls bénéficiaires du contrat, il ne peut en résulter aucun préjudice fiscal pour l’assuré. 

Le préjudice fiscal allégué résultant de la soumission aux droits de mutation sans l’exonération escomptée d’une partie importante de la prime versée ne pourra être établi qu’au jour du décès de l’assuré et les redevables de ces droits seront les bénéficiaires du contrat. Dès lors, ce préjudice n’est pas personnel à l’assuré qui conserve l’intégralité des sommes placées sur le contrat jusqu’à son décès et qui n’est donc pas recevable à s’en prévaloir.

A noter :

La Cour de cassation laisse ici ouverte la possibilité d’une action en responsabilité des bénéficiaires contre la banque et l’assureur, après le décès de l’assuré, l’éventuel préjudice subi ne pouvant être établi qu’après le dénouement du contrat. En effet, avant son décès, le souscripteur assuré peut racheter le contrat ou désigner de nouveaux bénéficiaires, dès lors que le bénéfice du contrat n’a pas été accepté (C. ass. art. L 132-9). 

Cette décision illustre l’importance du critère de l’âge de l’assuré lors du versement des primes, décisif pour déterminer le régime fiscal applicable aux bénéficiaires d’un contrat d’assurance-vie en cas de décès : prélèvement spécifique, après abattement de 152 500 € par bénéficiaire, en cas de versement avant 70 ans (CGI art. 990 I, I) ou droits de succession à concurrence du montant des primes, après abattement global de 30 500 € réparti entre les bénéficiaires, en cas de versement après 70 ans (CGI art. 757 B). 

Il appartient donc au souscripteur assuré, souhaitant verser des primes avant ses 70 ans pour que les bénéficiaires profitent du régime fiscal plus favorable, d’anticiper la démarche afin que le versement soit effectif avant l’âge requis. À défaut, le bénéficiaire s’estimant lésé du fait de l’application du régime fiscal de l’article 757 B du CGI devra apporter la preuve d’une faute de la banque ou de l’assureur en lien avec son préjudice. Cette preuve sera difficile à apporter, notamment lorsque la souscription tardive du contrat résulte d’un manque de diligence du souscripteur (CA Paris 7-9-2022 n° 20/13206 : BPAT 1/23 inf. 40).

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