La souscriptrice de trois contrats d’assurance-vie est placée sous tutelle. Sa tutrice, autorisée par une ordonnance du juge des tutelles, modifie la clause bénéficiaire des contrats au profit des héritiers selon la dévolution légale. Le fils de la souscriptrice, de bénéficiaire unique, devient bénéficiaire pour moitié seulement du capital. À la suite du décès de sa mère, il conteste l’ordonnance rendue près de 5 ans plus tôt. La cour d’appel déclare son appel recevable : l'ordonnance aurait dû lui être notifiée dès lors qu'elle a modifié le quantum des droits du requérant dans les contrats d'assurance-vie ; en l'absence d'une telle notification, le délai d'appel n'a pas commencé à courir.
Censure de la Cour de cassation. La personne dont la décision du juge des tutelles ne modifie pas les droits ne reçoit pas notification de celle-ci et doit former appel dans un délai de 15 jours à compter de la date de la décision (CPC art. 1230 et 1241-1 combinés). En l’espèce, le fils, qui n’avait pas accepté le bénéfice des contrats, n’avait aucun droit acquis à leur capital, de sorte que l’ordonnance n’avait pas à lui être notifiée. Il en résulte que le délai de 15 jours pour faire appel de la décision du juge des tutelles avait commencé à courir à compter de la date de cette décision et que l’appel formé près de 5 ans après était irrecevable.
A noter :
Pour fonder sa décision, la Cour de cassation rappelle trois règles.
D’abord, toute décision du juge des tutelles est notifiée, entre autres, à tous ceux dont elle modifie les droits ou obligations résultant de la mesure de protection (CPC art. 1230).
Ensuite, pour les personnes énumérées à l’article 430 du Code civil dont le « parent » du majeur protégé, le délai d’appel court à compter de (CPC art. 1239 et 1241-1 combinés) :
la notification de l’ordonnance pour les personnes à qui l’ordonnance doit être notifiée ;
l’ordonnance pour les autres personnes.
Enfin, seule l’acceptation du bénéfice du contrat d’assurance-vie par le bénéficiaire, avant son dénouement, a pour effet de rendre irrévocable la désignation (C. ass. art. L 132-9). En effet, cette acceptation « bloque » le contrat au profit du bénéficiaire acceptant : le souscripteur ne peut plus modifier la clause bénéficiaire sans son accord ni procéder à des rachats. L’acceptation nécessite l’accord du souscripteur et prend la forme d’un avenant au contrat signé de l’assureur, du souscripteur et du bénéficiaire, ou d’un acte authentique ou sous seing privé signé du souscripteur et du bénéficiaire et qui n’a d’effet à l’égard de l’assureur que lorsqu’il lui est notifié (C. ass. art. L 132-9).
L’acceptation d’un contrat conclu moins de 2 ans avant le placement sous curatelle ou tutelle du souscripteur peut être annulée sur la seule preuve que l’incapacité était notoire ou connue du bénéficiaire acceptant au moment de l’acte (C. ass. art. L 132-4-1, al. 4).