1. La loi Pacte a habilité le Gouvernement à créer par ordonnance « un dispositif unifié et contraignant encadrant la rémunération des dirigeants des sociétés cotées ». Vient en conséquence d’être publiée l’ordonnance 2019-1234 du 27 novembre 2019, complétée par le décret 2019-1235 du même jour, qui réforme la procédure d’encadrement de ces rémunérations (say on pay) instaurée par la loi Sapin 2 du 9 décembre 2016.
Est ainsi transposée en droit français la directive européenne 2007/36 du 11 juillet 2007 modifiée par la directive 2017/828 du 17 mai 2017 sur l’engagement à long terme des actionnaires.
2. Les nouvelles modalités d’encadrement de la rémunération des dirigeants entrent en vigueur à compter des assemblées générales statuant sur le premier exercice clos après le 28 novembre 2019.
Champ d’application du nouveau dispositif
3. Le nouveau dispositif s’applique à toutes les sociétés cotées (sociétés anonymes et sociétés en commandite par actions), à tous les mandataires sociaux (président et autres membres du conseil d’administration, président et autres membres du conseil de surveillance, directeurs généraux, directeurs généraux délégués, président et autres membres du directoire ou directeur général unique dans les sociétés anonymes ; gérants, président et autres membres du conseil de surveillance dans les sociétés en commandite par actions) et à toutes les rémunérations (y compris les engagements au bénéfice des dirigeants en cas de cessation des fonctions jusque-là soumis à la procédure des conventions réglementées).
Le dispositif s’organise autour de deux votes
4. Comme actuellement, l’assemblée des actionnaires est appelée à voter deux fois sur la rémunération des dirigeants.
Le premier vote (vote ex ante) porte sur la politique de rémunération des dirigeants établie par le conseil d’administration ou de surveillance de la société conformément à l’intérêt social. Cette politique doit décrire toutes les composantes de la rémunération fixe et variable et expliquer le processus de décision suivi pour sa détermination, sa révision et sa mise en œuvre.
Elle fait l’objet d’un projet de résolution soumis à l’approbation de l’assemblée ordinaire chaque année.
En cas de refusd’approbation de la résolution, la politique de rémunération précédemment approuvée continue de s’appliquer et le conseil d’administration ou de surveillance doit soumettre un nouveau projet de résolution à l’approbation de la prochaine assemblée générale. En l’absence de politique de rémunération précédemment approuvée et si l’assemblée générale n’approuve pas le projet de résolution, la rémunération est déterminée conformément à la rémunération attribuée au cours de l’exercice précédent. Si aucune rémunération n’a été attribuée au cours de l’exercice précédent, la rémunération est déterminée conformément aux pratiques existant au sein de la société.
Aucun élément de rémunération ne peut être attribué s’il n’est pas conforme à la politique de rémunération approuvée.
L’ordonnance permet cependant à la société, en cas de circonstances exceptionnelles, de déroger à l’application de la politique de rémunération ; mais cette dérogation doit être temporaire, conforme à l’intérêt social et nécessaire pour garantir la pérennité ou la viabilité de la société.
5. Le second vote (vote ex post) porte sur les rémunérations attribuées ou perçues au cours de l’exercice clos et se divise en plusieurs volets.
Le premier volet du vote ex post porte sur le rapport présentant les rémunérations versées ou attribuées aux dirigeants au cours de l’exercice clos. Dans ce cadre, l’assemblée générale ordinaire doit se prononcer chaque année via un projet de résolution sur les informations concernant l’ensemble des rémunérations des dirigeants et divers éléments s’y rapportant qui figurent dans le rapport sur le gouvernement d’entreprise. Si le projet de résolution est rejeté, le conseil d’administration ou de surveillance doit soumettre une politique de rémunération révisée à l’approbation de la prochaine assemblée générale. En attendant le nouveau vote, les sommes versées aux administrateurs et membres du conseil de surveillance en rémunération de leur activité (ex-jetons de présence) sont suspendues. Un nouveau vote négatif concernant la résolution sur la nouvelle politique de rémunération entraîne l’interdiction définitive de verser les rémunérations suspendues.
Le second volet du vote ex post porte sur les rémunérations individuelles de chaque dirigeant. A cette occasion, comme c’est déjà le cas actuellement, l’assemblée générale ordinaire statue sur les éléments fixes variables et exceptionnels composant la rémunération totale et les avantages de toute nature versés ou attribués au cours de l’exercice écoulé par des résolutions distinctes pour chaque mandataire social. Notons que les administrateurs et les membres du conseil de surveillance ne sont pas concernés par ce second volet du vote ex post.
En cas de vote négatif, les éléments fixes de rémunération restent acquis au dirigeant mais les éléments de rémunération variables et exceptionnels ne peuvent pas lui être versés.
Arnaud WURTZ