Des chèques destinés à une société sont endossés et encaissés sur le compte personnel de l'un de ses salariés, le nom de celui-ci ayant été ajouté à celui de la société en tant que bénéficiaire. La société poursuit la banque présentatrice de ces chèques et la banque tirée auxquelles elle reproche un défaut de vérification des chèques. Elle prétend notamment que la mention de deux bénéficiaires sur un chèque constitue en elle-même une anomalie qui aurait dû inciter les banques à s’interroger sur l’identité du réel bénéficiaire.
Sa demande est rejetée :
- la mention des deux bénéficiaires était de la même main et ne comportait ni rature ni autre particularité apparente ;
- cette mention pouvait identifier un seul bénéficiaire, après indication d'un autre élément sans importance, telle une enseigne.
Confirmation de jurisprudence.
En cas de paiement d'un chèque falsifié, la banque qui a procédé à l'encaissement du chèque n'encourt aucune responsabilité lorsque le paiement a eu lieu alors que la fraude n'était pas normalement décelable (Cass. com. 15-6-1993 n° 91-15.431 : RJDA 1/94 n° 73). Elle est ainsi libérée de son obligation de restitution des fonds (en vertu de l’article 1937 du Code civil) lorsque le chèque litigieux ne présente pas de trace évidente de falsification (Cass. com. 5-11-2002 n° 00-11.314 : RJDA 3/03 n° 306 ; Cass. com. 30-9-2008 n° 07-18.988 : RJDA 1/09 n° 53 ; Cass. com. 3-11-2015 n° 13-28.771 FS-D : BRDA 24/15 inf. 12).
S'agissant de la banque tirée, elle doit, avant de payer le chèque, vérifier, d'une part, que la chaîne des endossements n'a pas été interrompue de sorte que celui qui présente le chèque au paiement a la qualité de porteur légitime (Cass. com. 17-9-2013 n° 12-18.202, 12-20.198 : RJDA 12/13 n° 1046) et, d'autre part, la régularité formelle du chèque. Elle est donc tenue de vérifier que le chèque présente toutes les mentions obligatoires du chèque, contient une signature conforme à celle qu'il détient à titre de spécimen et ne présente pas d'irrégularités apparentes décelables par un employé de banque normalement diligent. La Cour suprême a déjà jugé, dans un cas où un chèque adressé en paiement à une société « P. câbles et systèmes France » et libellé à l'ordre de « P. » avait été encaissé par une personne ayant ouvert à l'étranger un compte sous le nom de « Marino P. », que la banque tirée avait effectué les vérifications requises et n'avait pas commis de faute en payant le chèque qui ne comportait ni surcharge ni grattage et dont la mention désignant l'endosseur concordait avec celle identifiant le bénéficiaire (Cass. com. 13-10-2015 n° 14-11.453 F-D : RJDA 4/16 n° 317).
Sophie CLAUDE-FENDT