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Inopposabilité partielle de la cession de créance de l’entrepreneur pour les travaux sous-traités

Le maître de l’ouvrage ne peut se prévaloir de l’inopposabilité de la créance cédée par l’entrepreneur principal qu’à concurrence du montant des travaux confiés au sous-traitant pour lesquels une garantie n’a pas été constituée.

Cass. 3e civ. 17-10-2024 n° 23-11.682 FS-B, Caisse régionale de crédit mutuel sud méditerranée c/ Sté Pernod Ricard France


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Des travaux sont confiés à une entreprise qui en sous-traite une partie et en garantit le paiement par la fourniture d’un cautionnement. L’entreprise principale cède à une société la totalité des créances résultant du marché. Plus tard, l’entreprise confie des travaux supplémentaires au sous-traitant. Elle est ensuite placée en redressement judiciaire. La société créancière réclame le paiement d’une situation au maître de l’ouvrage puis l’assigne en paiement. Elle est déboutée. Selon le moyen, la cour d’appel aurait estimé que l’absence de garantie pour les travaux supplémentaires aurait frappé d’inopposabilité l’ensemble de la créance cédée.

L’arrêt est cassé. Si le cautionnement ne couvre pas les travaux supplémentaires confiés au sous-traitant, la cession par l'entrepreneur principal de créances correspondant aux travaux sous-traités n'est inopposable au sous-traitant et à la caution subrogée que dans la limite des travaux dont le paiement n'a pas été garanti. Le maître de l'ouvrage ne peut donc se prévaloir de l'inopposabilité de la créance qu'à concurrence des sommes correspondant au montant des travaux supplémentaires non garantis.

A noter :

1. Pour inciter les constructeurs à constituer les garanties de paiement obligatoire en cas de sous-traitance, l’entrepreneur principal a été autorisé à céder ou nantir « l’intégralité » de sa créance, ce qui vise les travaux sous-traités, sous réserve d’avoir obtenu préalablement et par écrit un cautionnement (Loi 75-1334 du 31-12-1975 art. 13-1, al. 2 et, sur renvoi, art. 14). S’il n’est pas justifié de la constitution de la garantie, la cession n’est pas annulable mais il est fait obstacle au paiement de la créance réclamé par le cessionnaire au maître de l’ouvrage (Cass. 3e civ. 17-1-2019 n° 17-11.853 F-D : RJDA 4/19 n° 255, RDI 2019 p. 269). Celui-ci reste exposé à l’action directe du sous-traitant auquel la cession est inopposable, même si cette cession et le paiement effectué pour en assurer l’exécution sont antérieurs à l’exercice de cette action (Cass. com. 16-5-1995 n° 92-21.876 P : RJDA 11/95 n° 1298). Le sous-traitant peut toujours faire obstacle à son paiement par le maître de l’ouvrage, auquel la cession devient dès lors également inopposable. En l’espèce, la créance cédée par l’entrepreneur principale ne répondait que pour partie aux exigences légales.

2. On regrette que l’arrêt ne soit pas plus clair sur l’objet de la créance du cessionnaire. Il rappelle que le sous-traitant qui exerce l’action directe doit être payé par préférence au cessionnaire pour les travaux non garantis (Cass. 3e civ. 29-5-1991 n° 89-13.504 : Bull. civ. III n° 159) et confirme qu’en l’espèce ce fut le cas. La caution qui est subrogée aux droits du sous-traitant peut également exercer l’action directe (Cass. 3e civ. 18-5-2017 n° 16-10.719 FS-PBI : BPIM 3/17 inf. 205) et le moyen laisse entendre qu’elle a été désintéressée du montant garanti. L’arrêt commenté ne précise pas l’objet de la créance résiduelle, sinon qu’elle est relative à une situation, mais il admet implicitement qu’un solde du prix restait dû, sur lequel la cour de renvoi devra s’expliquer.  

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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