Un homme décède après son mariage in extremis en secondes noces avec sa compagne. Il laisse à sa survivance, en l’absence de descendants, sa veuve ainsi que la fille de sa première épouse qu’il a instituée légataire universelle aux termes d’un testament olographe inscrit au fichier des dispositions de dernières volontés. Lors de l’ouverture de la succession, le notaire en charge de son règlement constate la perte de l’écrit testamentaire, dans des circonstances indéterminées. L’ex-belle-fille assigne alors le conjoint survivant aux fins d’envoi en possession.
La cour d’appel lui donne raison : les déclarations constantes et concordantes du notaire et des témoins, proches du défunt, suffisent à établir que celui-ci, par le testament égaré, l’instituait légataire universelle.
Censure – sans surprise – du raisonnement des juges du fond par la Cour de cassation. C’est seulement en l’absence d’héritier réservataire que, saisi de plein droit par la mort du testateur, sans être tenu de demander la délivrance, un légataire universel peut se faire envoyer en possession en cas d’opposition (C. civ. art. 1004, 1006 et 1007). Or, en l’absence d’annulation de son mariage in extremis avec sa compagne, celle-ci a la qualité d’héritière réservataire. En conséquence, son ex-belle-fille ne pouvait pas se prévaloir de celle de légataire universelle saisie de plein droit pour solliciter son envoi en possession.
A noter :
Le mariage à l’approche de la mort de l’un des deux futurs époux, dit « mariage in extremis », produit ses pleins effets (sous réserve de son éventuelle contestation, bien sûr). Cette affaire l’illustre, en confirmant la qualité de conjoint survivant de celui marié in extremis : il est successible et même, en l’absence de descendants, héritier réservataire (C. civ. art. 732 et 914-1).
Il s’en infère, et c’est un autre rappel de l’arrêt, qu’en présence d’un tiers institué par testament olographe légataire universel (ici l’ex-belle-fille du défunt) et d’un héritier réservataire (la veuve en secondes noces du défunt à défaut de descendance), c’est à ce dernier que le légataire universel doit s’adresser pour demander la délivrance de son legs. La formalité de l’envoi en possession est exclue, réservée au seul cas de figure où le défunt ne laisse aucun héritier à réserve. La Cour de cassation l’énonce clairement au visa des articles 1004, 1006 et 1007 du Code civil : « c’est seulement en l’absence d’héritier réservataire que, saisi de plein droit par la mort du testateur, sans être tenu de demander la délivrance, un légataire universel peut se faire envoyer en possession en cas d’opposition ».
Reste que le notaire est, en l’espèce, susceptible de voir sa responsabilité engagée pour la perte du testament dont il était le dépositaire ; peu importe que l’ex-belle-fille soit en mesure de faire valoir ses droits dans la succession (pour une illustration, Cass. 1e civ. 8-3-2012 n° 10-28.725 F-D).