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Si le mineur est placé à l’ASE, son hébergement à temps complet ne peut être accordé aux parents

Le placement de l’enfant auprès de l’ASE ayant un caractère subsidiaire à toute mesure permettant son maintien dans le milieu familial, le juge des enfants ne peut combiner ce placement avec l’octroi aux parents d’un droit d’hébergement à temps complet.

Cass. 1e civ. 2-10-2024 n° 21-25.974 FB ; Cass. 1e civ. 2-10-2024 n° 22-13.618 FD


Par Julie LABASSE
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©Getty Images

Dans deux affaires, une cour d’appel confirme le renouvellement du placement d’enfants auprès de l’aide sociale à l’enfance (ASE) avec attribution, à l’un des parents, d’un droit d’hébergement à temps complet. Le département se pourvoit considérant que si la protection de l’enfant exige un placement auprès de l’ASE, il est exclu que l’enfant demeure chez l’un de ses parents.

La Cour de cassation lui donne raison. Lorsqu’un enfant est en danger, le JE peut ordonner une mesure d’assistance éducative (C. civ. art. 375). Le maintien de l’enfant dans son environnement familial est à privilégier (C. civ. art. 375-2). Mais si la protection de l’enfant l’exige, il peut être confié à l’ASE (C. civ. art. 375-3, 3°). Le JE fixe alors les modalités d’exercice du droit de visite et d’hébergement du ou des parents, et le lieu d’accueil de l’enfant doit être recherché dans l’intérêt de celui-ci (C. civ. art. 375-7). Il résulte de ces textes que les juges du fond ne peuvent décider du maintien du placement à l’ASE et de l’octroi à l’un des parents d’un droit d’hébergement à temps complet.

A noter :

Le placement de l’enfant auprès de l’ASE doit être envisagé de manière subsidiaire, seulement s’il y a une impossibilité de le maintenir dans son milieu familial (C. civ. art. 375-2). Si tel est le cas, le juge des enfants ne peut alors mobiliser l’article 375-7 du Code civil lui permettant de fixer les modalités d’exercice du droit de visite et d’hébergement des parents pour leur octroyer un droit d’hébergement à temps complet. En l’espèce, il eût été conforme aux textes de suspendre le placement auprès de l’ASE et d’ordonner l’ouverture d’une mesure d’assistance éducative en milieu ouvert (Aemo) avec autorisation d’hébergement ou d’ordonner un placement auprès de l’autre parent (C. civ. art. 375-2 et 375-3, 1°).

C’est une première condamnation par la Cour de cassation de la pratique du placement éducatif à domicile (PEAD) conformément à son avis rendu en février dernier (Cass. 1e civ. avis 14-2-2024 n° 23-70.015 : BPAT 2/24 inf. 63).

Par cet avis, la Haute Juridiction a clarifié les mesures susceptibles d’être prises en matière d’assistance éducative depuis la loi Taquet (Loi 2024-86 du 7-2-2024). Elle précise que le placement éducatif à domicile (PEAD) relève nécessairement d’une AEMO, renforcée ou intensifiée avec éventuellement hébergement exceptionnel, et ne peut constituer une mesure de placement à proprement parler.

Cet avis a été salué par la doctrine (C. Siffrein-Blanc, Le « placement à domicile », un oxymore remis en cause par la Cour de cassation : Dr. famille comm. 53). Car la pratique du placement à domicile soulève de nombreuses questions juridiques : comment articuler le placement avec la prise d’actes usuels, l’évaluation préalable d’un placement familial ou auprès d’un tiers de confiance, la mise en place du projet pour l’enfant et de son accompagnement par un tiers digne de confiance, la responsabilité des dommages causés par l’enfant, la prise en charge financière de l’enfant ou encore la perception des allocations familiales. On le sait, l’Assemblée plénière, à propos de la responsabilité parentale, vient de redéfinir la notion de cohabitation caractérisant la responsabilité parentale (Cass. ass. plén. 28-6-2024 n° 22-84.760 BR : BPAT 5/24 inf. 184). Désormais, tous les parents exerçant l’autorité parentale sont responsables sauf si une décision administrative au judiciaire a confié l’enfant à un tiers. Comment transposer cela au PEAD puisque l’enfant est confié à l’ASE mais demeure chez son parent ?

Cette clarification des dispositifs apportée par la Cour de cassation est toutefois très décriée par le milieu associatif qui, consciente des questions juridiques soulevées, plaide pour un encadrement législatif du PEAD (CNAPE, Le placement éducatif à domicile, une innovation à protéger en droit et à développer dans les pratiques : 19-9-2024). Le PEAD permet notamment la mise en place de restrictions des droits de visite et d’hébergement de l’un des parents, en cas de violences intrafamiliales par exemple, ce que ne permet pas l’AEMO (F. Rogue, Le placement éducatif à domicile, de l’innovation à la qualification juridique : D. 2024 p. 1114).

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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