Des époux décèdent, laissant huit enfants. Des difficultés surviennent lors des opérations de partage des successions, notamment quant à une créance de salaire différé réclamée par l’un des enfants pour avoir participé à l’exploitation agricole familiale.
La cour d’appel de Besançon lui accorde une telle créance, liquidable sur la base de quarante mois et trois jours. Elle retient à cet effet quatre attestations qui apportent des témoignages précis et différents sur les travaux effectués, confirmant la participation de l’intéressé à l’exploitation.
Censure de la Cour de cassation au visa de l’article L 321-13 du Code rural et de la pêche maritime. Il résulte de ce texte que le descendant d’un exploitant agricole qui a participé partiellement à l’exploitation ne peut bénéficier que d’une créance de salaire différé partielle. Or les juges d’appel ont relevé, par motifs adoptés, qu’il ressortait d’une attestation de l’assurance retraite qu’au cours de la période considérée l’enfant concerné avait été soit partiellement en activité, en qualité d’apprenti ou de salarié, soit sans emploi. Ils n’ont donc pas tiré les conséquences légales de leurs propres constatations.
A noter :
Pour les descendants (et, le cas échéant, leur conjoint), le montant annuel du salaire différé est égal, pour chacune des années de participation à partir de 18 ans, aux 2 tiers de 2 080 fois le montant horaire du Smic en vigueur, soit au jour du partage en cas de règlement après le décès de l'exploitant, soit à la date du règlement de la créance si ce règlement intervient du vivant de l'exploitant (C. rur. art. L 321-13, al. 2 et L 321-15, al. 1). Les années de participation prises en compte sont plafonnées à dix ans (C. rur. art. L 321-17, al. 3), y compris lorsque les parents ont été successivement exploitants. Le salaire ainsi calculé est minoré des sommes éventuellement déjà perçues, hors argent de poche, par le bénéficiaire (Cass. 1e civ. 16-7-1985 n° 83-13.929 : Bull. civ. I n° 225). Il l'est aussi, comme le rappelle la décision rapportée, lorsque le descendant n'a travaillé que partiellement sur l'exploitation (Cass. 1e civ. 8-7-2009 n° 08-13.972 F-PB : Bull. civ. I n° 169, Dr. rural 2010 comm. 43 par F. Roussel). Ni cette décision rendue en 2009 ni celle rapportée n’apportent toutefois de précision concernant les modalités pratiques et concrètes de calcul du montant de la créance de salaire différé dans cette situation de participation partielle ; il semblerait logique que ce montant soit proportionnel au temps effectivement consacré par l’intéressé à la mise en valeur de l’exploitation (F. Roussel, précité).
Bien que la créance de salaire différé, qui est une créance contre la succession, ne soit pas exigible du vivant de l'exploitant, elle peut faire l'objet d'un règlement par anticipation. Un tel règlement peut se faire par différents moyens. La loi envisage spécialement le cas où il intervient par donation-partage (C. rur. art. L 321-17, al. 1 in fine). Mais il peut s'agir d'une autre convention, notamment une donation simple dispensée de rapport (Cass. 1e civ. 22-3-2005 n° 02-21.332 F-PB : Bull. civ. I n° 153 ; Cass. 1e civ. 31-5-2005 n° 02-17.541 F-PB : Bull. civ. I n° 239). De tels procédés peuvent faciliter l’installation du jeune agriculteur (P. Malaurie et C. Brenner, Droit des successions et des libéralités, Lextenso, 10e éd., 2022, n° 747).
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