Mariés en Suisse sous le régime légal suisse de la participation aux acquêts en 1982, des époux – le mari de nationalité roumaine, l’épouse de nationalité suisse – se séparent. Ils divorcent en 1993, le jugement homologuant la convention qui contient la liquidation de leur régime matrimonial. Alors que chacun a refait sa vie en France, Madame assigne devant le juge français son ex en liquidation complémentaire de leur régime matrimonial et recel. Elle affirme que ce dernier a acquis pendant leur mariage des biens immobiliers situés en France, lesquels n’ont pas été compris dans la convention de divorce.
Pour statuer en sa faveur, la cour d’appel reconnaît, au préalable, l’application de la loi française au litige (C. civ. art. 3 ; CPC art. 42, 43, 14 et 1070), ce pour deux raisons :
l’action en partage complémentaire est autonome par rapport à la convention de divorce régie par le droit suisse ;
chacune des parties a son domicile en France à la date du litige et l’immeuble omis est situé sur ce même territoire.
Par suite, la liquidation complémentaire est ordonnée et le juge d’appel fixe également le montant de la créance de participation de Madame après avoir reconnu l’époux divorcé coupable de recel de communauté (C. civ. art. 1477).
N’est pas de cet avis la Haute Juridiction, qui rappelle que la loi du régime matrimonial en détermine les règles de liquidation sauf dans le cas où les époux sont convenus, dans leurs rapports réciproques, d’une liquidation sur des bases différentes (C. civ. art. 3). En l’espèce, il n’était pas contesté que les époux s’étaient mariés sous le régime légal suisse et qu’ils n’avaient pas changé de régime matrimonial. La loi suisse est donc applicable au litige.
A noter :
Les époux se sont mariés avant le 1er septembre 1992, date de l’entrée en vigueur de la convention de La Haye du 14 mars 1978 sur la loi applicable aux régimes matrimoniaux. Ils relèvent donc du droit international privé français (C. civ. art. 3). Par application du principe d’indivisibilité du régime matrimonial, la loi applicable au régime gouverne aussi sa liquidation, sauf accord des époux pour l’effectuer sur des bases différentes. C’est là le principal rappel de cet arrêt appliqué à une liquidation complémentaire rendue nécessaire par l’omission d’un immeuble (Cass. 1e civ. 3-1-1985 n° 83-15.386 : Bull. civ. I n° 3, Rev. crit. DIP 1985 p. 652 note H. Batiffol ; Cass. 1e civ. 25-1-2005 n° 02-15.648 : Bull. civ. I n° 33, Rev. crit. DIP 2005 p. 300, note B. Ancel ; Cass. 1e civ. 23-5-2006 n° 05-18.385 FS-PB : Rev. crit. DIP 2006 p. 841 note M. Revillard).
Précision que ces solutions antérieures à la convention de La Haye n'ont pas été infirmées par elle, ni d'ailleurs par le Règlement européen Régimes matrimoniaux 2016/1103 du 24 juin 2016 (lequel s'applique aux époux mariés depuis le 29 janvier 2019), et sont considérées comme également applicables sous l'empire de ces textes (Rép. dr. international, Régimes matrimoniaux – Domaine de la loi applicable n°s 176 s. par P. Lagarde).