Exécution du contrat
L'employeur ne peut pas refuser aux salariés transférés le bénéfice dans l'entreprise d'accueil des avantages collectifs, qu'ils soient instaurés par voie d'accords collectifs, d'usages ou d'un engagement unilatéral de l'employeur, au motif que ces salariés tiennent des droits d'un usage ou d'un engagement unilatéral en vigueur dans leur entreprise d'origine au jour du transfert ou des avantages individuels acquis en cas de mise en cause d'un accord collectif (très nombreux arrêts du 11-9-2024 dont Cass. soc. 11-9-2024 n°s 22-14.854 F-D, 22-15.015 F-D et 23-10.187 F-D).
Dès lors que l'activité de l'entité avait été poursuivie dans son identité par la société Acna avec reprise des moyens significatifs nécessaires à l'activité de l'entité économique à laquelle étaient rattachés les salariés de la société GSF Aéro, peu important que cette reprise n'ait pas eu lieu au volume d'activité auparavant confié à cette dernière, la cour d'appel a pu retenir que la société Acna avait repris l'activité précédemment sous-traitée à la société GSF Aéro (Cass. soc. 11-9-2024 n° 22-19.370 F-D).
La cour d’appel a pu déduire des éléments suivants le transfert d'une entité économique autonome conservant son identité et dont l'activité avait été poursuivie dès le mois de juillet 2016, peu important la courte interruption temporaire d’activité durant l’été (Cass. soc. 11-9-2024 n° 22-23.882 F-D) :
les associations EMCE et Paroles et musiques sont deux structures à but non lucratif ayant un objet pratiquement identique et le socle de leur activité est l'enseignement de la musique, avec des activités accessoires semblables, dispensé dans le cadre d'un contrat conclu avec la ville, en vue d'organiser une complémentarité et un partenariat avec le conservatoire local de musique et bénéficiant d'une mise à disposition de moyens et de locaux municipaux permettant la poursuite du projet ;
la municipalité, ne souhaitant pas renouveler la convention de partenariat, qui arrivait à échéance en juillet 2016, conclue avec l'association EMCE, en raison d'une défiance envers cette dernière et plus particulièrement envers ses cofondateurs, a suscité la création de l'association Paroles et musiques en vue de la négociation d'une nouvelle convention ;
l'association Paroles et musiques a été déclarée en préfecture le 5 juillet 2016 et que, si la convention de partenariat avec la ville n'a été officiellement signée qu'en octobre 2016, après délibération du 29 septembre 2016, le principe en était acquis dès le 16 juin 2016 de sorte que la nouvelle association a informé, dès le 25 juillet 2016, les parents d'élèves que des inscriptions étaient possibles pour la rentrée à l'association Paroles et musiques s'ils souhaitaient « continuer le travail commencé à l'EMCE » ;
enfin, l'association Paroles et musiques a été créée pour reprendre l'activité de l'association EMCE et s'y substituer dans la convention de partenariat avec la ville, qu'elle l'a fait en reprenant les subventions municipales ainsi que les moyens matériels et de locaux mis à disposition par la ville, peu important qu'il ne s'agisse pas exactement des mêmes locaux, en embauchant 6 des anciens professeurs de l'association EMCE, et en bénéficiant des inscriptions du même public que précédemment, reprenant ainsi les moyens significatifs propres de l'association EMCE nécessaires à l'exploitation de l'activité.
Epargne salariale
La cour d'appel, après avoir constaté que le salarié avait été licencié sans cause réelle et sérieuse 4 jours seulement avant la date lui ouvrant droit aux actions gratuites, a, sans être tenue de s'expliquer sur les éléments de preuve qu'elle décidait d'écarter, ni méconnaître les termes du litige, souverainement fixé le préjudice subi en fonction des éléments versés aux débats par chaque partie, le montant retenu n'atteignant toutefois pas le maximum de 213 646,68 euros auquel le salarié aurait eu droit si l'objectif de performance de 150 % avait été réalisé (Cass. soc. 11-9-2024 n° 23-10.115 F-D).
Rupture du contrat
Le fait pour un salarié de méconnaître l'obligation de secret professionnel à laquelle il est astreint en transmettant à un tiers, sans raison valable, la fiche du répertoire national inter-régimes des bénéficiaires de l'assurance maladie d'un ministre en exercice, contenant des données dont la caisse est garante du caractère confidentiel à laquelle il a eu accès dans le cadre de ses fonctions, est de nature à rendre impossible son maintien dans l'entreprise et justifie son licenciement pour faute grave (Cass. soc. 11-9-2024 n° 22-13.531 F-D).
Le fait pour un salarié de méconnaître l'obligation de secret professionnel à laquelle il est astreint en transmettant à un tiers, sans raison valable, l'attestation de salaire d'une personnalité publique comportant des données confidentielles, à laquelle il a eu accès dans le cadre de ses fonctions, est de nature à rendre impossible son maintien dans l'entreprise et justifie son licenciement pour faute grave (Cass. soc. 11-9-2024 n° 22-13.532 F-D).
Le comportement fautif retenu comme cause du licenciement ne peut résulter que d'un fait imputable au salarié. A statué par des motifs impropres à caractériser à l'encontre de la salariée des faits qui lui seraient imputables et de nature à justiifer une faute grave la cour d'appel constatant que l'altercation qui lui est reprochée s'est produite hors du temps et du lieu du travail et a opposé son supérieur hiérarchique et son compagnon, ancien salarié de l'entreprise (Cass. soc. 11-9-2024 n° 23-15.406 F-D).
Si la lettre de licenciement doit énoncer des motifs précis et matériellement vérifiables, la datation des faits invoqués n'est pas nécessaire et l'employeur est en droit, en cas de contestation, d'invoquer toutes les circonstances de fait qui permettent de justifier ces motifs (Cass. soc. 11-9-2024 n° 22-24.514 F-D).
Ayant constaté que les offres de reclassement adressées aux salariés menacés de licenciement économique précisaient qu'en cas d'intérêt pour l'un des postes proposés, un entretien serait organisé avec une personne dédiée pour s'assurer de la compatibilité de leurs capacités avec l'emploi proposé, cette procédure de recrutement devant permettre de départager les salariés en cas de candidatures multiples sur un même poste, la cour d'appel a pu en déduire que ces offres, qui n'étaient pas fermes et ne garantissaient pas le reclassement effectif du salarié en cas d'emploi disponible dans le groupe, n'étaient ni claires ni précises et ne répondaient pas aux exigences légales (Cass. soc. 11-9-2024 n° 23-10.460 F-D).
Le document écrit par lequel l'employeur informe le salarié adhérant au contrat de sécurisation professionnelle du motif économique de la rupture de son contrat doit énoncer à la fois la raison économique qui fonde la décision et sa conséquence précise sur l'emploi ou le contrat de travail du salarié. A défaut, la rupture est dépourvue de cause réelle et sérieuse. L'employeur n'a pas satisfait à cette obligation en transmettant à la salariée un courrier électronique comportant en pièce attachée le compte-rendu de la réunion avec les représentants du personnel relative au licenciement pour motif économique envisagé, celui-ci n'énonçant pas l'incidence des difficultés économiques invoquées sur l'emploi de la salariée (Cass. soc. 11-9-2024 n° 22-18.629 F-D).
Représentation du personnel
Lorsque le protocole d'accord préélectoral répond aux conditions de double majorité, il ne peut être contesté devant le juge judiciaire qu'en ce qu'il contiendrait des stipulations contraires à l'ordre public, notamment en ce qu'elles méconnaîtraient les principes généraux du droit électoral. Toutefois un syndicat qui, soit a signé un tel protocole sans réserves, soit a présenté des candidats sans émettre de réserves, ne saurait, après proclamation des résultats des élections professionnelles, contester la validité du protocole d'accord préélectoral et demander l'annulation des élections, quand bien même invoquerait-il une méconnaissance par le protocole préélectoral de règles d'ordre public. Il en va de même pour un salarié candidat ou élu sur la liste présentée par de tels syndicats (Cass. soc. 11-9-2024 n° 23-15.822 F-B).
La constatation par le juge, après l'élection, du non-respect par une liste de candidats des prescriptions prévues à la seconde phrase du premier alinéa de l'article L 2314-30 du Code du travail (alternance sur les listes de candidats d’un candidat de chaque sexe) entraîne l'annulation de l'élection du ou des élus dont le positionnement sur la liste de candidats ne respecte pas ces prescriptions. Aux termes du dernier alinéa de cet article, le cas échéant, il est fait application des dispositions de l'article L 2314-10 du Code du travail. Selon ce dernier texte, des élections partielles sont organisées à l'initiative de l'employeur si un collège électoral n'est plus représenté ou si le nombre des membres titulaires de la délégation du personnel du CSE est réduit de moitié ou plus, sauf si ces événements interviennent moins de 6 mois avant le terme du mandat des membres de la délégation du personnel du CSE. Il en résulte que les dispositions des articles R 2314-19 à R 2314-21 du Code du travail, permettant au juge de rectifier l'attribution erronée des sièges à l'issue du scrutin, ne s'appliquent pas en cas de vacance consécutive à l'annulation de l'élection d'un salarié en application de l'article L 2314-32 du Code du travail sanctionnant le non-respect des règles de représentation équilibrée des femmes et des hommes imposées par l'article L 2314-30 du même Code (Cass. soc. 11-9-2024 n° 23-60.107 F-B).
Ayant constaté que 5 salariés n'avaient pas pu accéder à la plateforme de vote électronique, le tribunal, qui n'était saisi d'aucune demande de vérification des listes d'émargement, a retenu que, en dépit des différentes mesures prises par l'employeur pour garantir la confidentialité des votes et des données transmises, une faille du système de vote électronique était démontrée. Il a pu en déduire une atteinte à la sincérité et au secret du vote, principe général du droit électoral, de sorte que la nullité des élections était encourue (Cass. soc. 11-9-2024 n° 23-16.209 F-D).
Le CSE peut décider de recourir à un expert-comptable en vue de la consultation sur la situation économique et financière de l'entreprise. Le jugement retient que le point n° 4 inscrit à l'ordre du jour de la réunion du CSE d'établissement du 19 mai 2022 concernait une information avant consultation sur les contrats d'objectifs de la RATP, que l’objet et le contenu de cette information-consultation différaient de celle afférente à la situation économique et financière de l'entreprise et qu’il s'agissait d'une consultation supplémentaire non prévue légalement. Le président du tribunal en a exactement déduit que cette consultation était une consultation supplémentaire, distincte de celle sur la situation économique et financière de l'entreprise et non légalement prévue, de sorte que le comité n'était pas en droit de recourir à une expertise (Cass. soc. 11-9-2024 n° 23-14.175 F-D).
L'employeur qui saisit le président du tribunal judiciaire selon la procédure accélérée au fond en annulation de la décision de recourir à un expert-comptable lors de la procédure d'alerte économique prévue à l'article L 2312-63 du même Code, s'il peut contester la nécessité de l'expertise, le choix de l'expert, le coût prévisionnel, l'étendue ou la durée de l'expertise, ne peut remettre en cause par voie d'exception la régularité de la procédure d'alerte économique déclenchée par le CSE. C'est dès lors à bon droit que le président du tribunal judiciaire a retenu qu'il n'avait pas à statuer sur le bien-fondé du droit d'alerte économique exercé par le comité mais seulement à apprécier la nécessité de l'expertise.C'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation que le président du tribunal judiciaire a estimé que l'expertise n'était pas nécessaire, le comité étant déjà suffisamment éclairé par l'expertise comptable ordonnée le 2 juillet 2022 à l'occasion de l'information-consultation sur la situation économique et financière de l'entreprise, et que, le comité ayant décidé de recourir à 14 expertises en 2 ans et demi, dont 3 dans le cadre du droit d'alerte économique, l'expertise litigieuse avait un caractère abusif (Cass. soc. 11-9-2024 n° 23-12.500 F-D).
Dès lors que le contrat de travail du salarié protégé stipulait qu'il acceptait de partir en déplacement en contrepartie d'une indemnité journalière, qu'il avait déjà effectué des grands déplacements et qu'il n'expliquait ni en quoi il aurait été empêché de réaliser le déplacement temporaire prévu ni en quoi celui-ci aurait entravé son mandat de représentant des salariés ou porté une atteinte excessive à ses impératifs personnels, la cour d'appel a pu en déduire que son déplacement provisoire, fût-ce en dehors de son secteur d'activité, demeurait exceptionnel et ne s'analysait pas en un changement de ses conditions de travail, de sorte que l'accord du salarié en sa qualité de salarié protégé n'était pas nécessaire (Cass. soc. 11-9-2024 n° 23-14.627 F-D).
Si un syndicat n'a d'existence légale que du jour du dépôt en mairie de ses statuts et du nom des personnes chargées de sa direction ou de son administration, le renouvellement de ce dépôt en cas de changement de la direction ou des statuts ne constitue qu'une formalité sans effet sur les conditions de son existence (Cass. soc. 11-9-2024 n° 23-11.648 F-D).
Négociation collective
L'obligation de négociation sur la gestion des emplois et des parcours professionnels est subordonnée à l'existence d'une ou plusieurs organisations syndicales représentatives au niveau de l'entreprise (Cass. soc. 11-9-2024 n° 23-14.333 F-B).
Santé et sécurité
Dès lors que la cessation d'activité est réelle et qu'elle rend impossible la poursuite du contrat de travail, la résiliation de ce contrat n'est pas contraire aux dispositions du Code du travail relatives au licenciement d'un salarié pendant une période de suspension consécutive à un accident du travail n'autorisant un tel licenciement que s'il est justifié soit par une faute grave du salarié, soit par l'impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie (Cass. soc. 11-9-2024 n° 22-18.409 F-B).